Introduction : Le défi du dépistage du VIH en Afrique
Bien qu'elle ne compte qu'environ 10 % de la population mondiale, l'Afrique rassemble ainsi 70 % des cas de séropositivité au VIH. En Afrique du Sud, 18,9% des habitants sont atteints du VIH. Ce taux de cas positifs est très important et doit être vite réglé. Pour cela, des tests sont faits pour chaque personne du pays pour savoir s’ils sont positifs. S’ils le sont alors, ils devront prendre un traitement pour éviter de transmettre la maladie. Or, le système de tests est très coûteux : en effet, un test de dépistage coûte 15€ à l’unité. Il faudrait donc trouver une solution pour éviter de consommer trop de tests.
Il sera donc intéressant de se demander : comment optimiser les prélèvements sanguins lors d’une campagne de dépistage du VIH ? Dans un premier temps, nous verrons la méthode du "bain de sang" (regroupement d'échantillons), puis un exercice permettant de prouver que cette méthode peut s’avérer efficace, et enfin les raisons pour lesquelles elle n’est pas utilisée.
La méthode du regroupement d'échantillons ("bain de sang")
Une solution intéressante serait de faire une prise de sang générale, c’est-à-dire de tester un groupe de personnes (par exemple, une vingtaine) en mélangeant leur sang. Cela permettrait d’utiliser un unique test pour ce groupe.
- Si le test groupé est négatif, alors des tests auront été économisés.
- À l'inverse, si le test s’avère positif, il faudra alors tester chaque personne individuellement pour trouver la ou les personnes positives dans le lot.
Cette méthode pourrait, dans un certain nombre de cas, permettre d'économiser des tests. Il est donc intéressant de se demander si cette méthode pourrait s’avérer efficace pour économiser des tests.
Démonstration de l'efficacité par les variables aléatoires
En utilisant les variables aléatoires, on peut démontrer si cette solution est efficace. Prenons un exemple :
On cherche ici à savoir quelle méthode, entre le cas par cas et le regroupement, est la moins coûteuse. On cherche à montrer que E(Xn) < n, où :
- E(Xn) représente l’espérance du nombre de tests à effectuer pour un groupe de n personnes.
- n est le nombre de personnes à tester dans le groupe.
- Xn est la variable aléatoire qui donne le nombre d’analyses à effectuer pour ce groupe.
On cherche à démontrer cette inéquation car celle-ci prouvera que la méthode par regroupement est efficace si l’espérance du nombre de tests est inférieure au nombre de personnes (c'est-à-dire au nombre de tests nécessaires en testant individuellement).
On établit tout d'abord un tableau donnant la loi de probabilité, où l’on calcule la probabilité en fonction de l’événement. Celle-ci va nous permettre de trouver l’espérance. Cette espérance nous permettra de faire le calcul final pour voir si cette méthode est efficace.
Loi de probabilité de Xn
Valeurs prises par Xn (xi) |
1 (le test groupé est négatif) |
n+1 (le test groupé est positif, on teste ensuite les n individus) |
P(Xn = xi) |
pn (en supposant une probabilité p d'être négatif, ici p=0.9, donc 0.9n ou, si p est la probabilité d'être positif, (1-p)n. Le texte mentionne 0,81n, ce qui correspondrait à (0.9)2n ou à une probabilité de non-infection de 0.81 pour chaque individu. Clarifions avec la valeur du texte : 0,81n est utilisé comme P(tous négatifs)) |
1 - 0,81n |
Note: Le texte original indique P(Xn=1) = 0,81n. Cela suppose que 0,81 est la probabilité qu'un individu soit négatif ET que cette probabilité est indépendante. L'espérance E(Xn) est alors 1 * (0,81n) + (n+1) * (1 - 0,81n).
Ensuite, il faut trouver s’il existe un nombre de personnes minimum et maximum à tester dans un groupe pour que la méthode soit efficace (E(Xn) < n). Pour cela, on étudie la fonction f(n) = E(Xn) - n, et on cherche quand f(n) < 0. On étudie ensuite la fonction, c’est-à-dire qu’on la dérive et qu’on étudie ses variations. On utilise le théorème des valeurs intermédiaires (TVI) pour montrer qu'il existe une unique solution sur un intervalle pertinent (par exemple, [5; +∞[) à l'équation f(x)=0.
Par exemple, si l'on remarque que la fonction est décroissante et strictement continue sur [5; +∞[ et que 0 est compris entre f(limite supérieure) et f(5), alors d'après le TVI, il existe un entier α dans [5; +∞[ tel que f(α)=0.
À l’aide de la calculatrice ainsi que des calculs faits précédemment (non détaillés ici mais mentionnés dans le propos original), on retrouverait qu’entre 5 et 11 personnes par groupe, la méthode s’avère efficace.
La première méthode (regroupement) permet donc de diminuer le nombre d’analyses dès que E(Xn) < n. En ayant démontré cela, on peut en conclure que la méthode par regroupement diminue le nombre total d'analyses pour des échantillons comportant au maximum environ 11 personnes (selon les probabilités de base utilisées). Donc, pour des groupes de 5 à 11 personnes, la méthode s’avère efficace.
Pourquoi cette méthode n'est-elle pas (ou peu) utilisée ?
En revanche, il existe différentes raisons pour lesquelles cette méthode n’est pas universellement utilisée malgré son potentiel d'économie :
- Contamination croisée : Mélanger le sang pourrait entraîner une contamination croisée des échantillons, faussant les résultats.
- Complexité logistique : Le mélange de sang nécessiterait une infrastructure et des processus complexes pour le traitement des échantillons, l'étiquetage, le suivi des résultats, etc. Cela augmenterait considérablement la complexité logistique de la campagne de dépistage, ce qui pourrait entraîner des erreurs et des retards dans la communication des résultats.
- Variabilité individuelle et sensibilité des tests : Les résultats d'un test de dépistage peuvent varier en fonction de plusieurs facteurs, tels que le moment de l'infection, la charge virale de chaque individu et la sensibilité du test utilisé. En mélangeant le sang (surtout en cas de faible charge virale diluée dans un grand volume), il serait difficile, voire impossible, de quantifier ces variations individuelles ou de détecter des infections à faible charge, rendant les résultats potentiellement moins fiables. Un effet de dilution pourrait masquer un cas positif.
- Nécessité de résultats individuels précis : Il est essentiel de réaliser des tests individuels pour chaque personne dans le cadre d'une campagne de dépistage afin d'obtenir des résultats précis et fiables pour chaque individu. Cela permet une identification adéquate des personnes infectées, un suivi approprié et une réponse efficace à la propagation des maladies.
Conclusion
Pour conclure, on remarque que cette méthode de regroupement d'échantillons est mathématiquement plus efficace que la méthode du cas par cas sur un certain intervalle de taille de groupe et pour une prévalence donnée de la maladie. Or, de nos jours, elle n’est pas utilisée de manière généralisée car il existe encore beaucoup de défaillances potentielles ou de défis pratiques liés à cette méthode, notamment en termes de fiabilité, de logistique et de risques de contamination ou de faux négatifs dus à la dilution.